Exposition "Les contrebandiers"
EXPOSITION
► Galerie H - Bât. H
► Université Paul-Valéry
► Du 7 mars au 28 mai
Entrée libre
▬▬ EXPOSITION LES CONTREBANDIERS
Marine Lanier fait partie de ces photographes paradoxaux dont la pratique, pourtant fermement inscrite dans la réalité d’un lieu et d’un moment, cherche tout autant à s’en extraire. Dans les séries qu’elle compose depuis 2006, le présent se tourne vers le passé, le vécu se charge d’imaginaire et le familier ouvre vers l’étrange : le réel passe au filtre du regard et de la prise de vue, qui refusent toute forme d’objectivité et toute idée de transparence.
Ainsi, loin d’être un reportage sur l’économie frontalière clandestine des biens et des personnes – mais riche de sa mythologie –, « Les Contrebandiers » est une évocation poétique d’une marginalité discrète et nomade incarnée par les quelques silhouettes humaines qui la peuplent. Ces dernières, quoique repliées sur elles-mêmes ou sur leurs gestes, dialoguent avec des paysages de montagne qu’elles pourraient avoir traversés et des objets de fortune – un gobelet de fer blanc, un couteau, un livre – qui pourraient leur appartenir.
À l’alternance des types de motifs répondent des variations de distance et de chaleur. Si les plans – rapprochés, moyens, éloignés – dépendent des sujets – objets, corps, paysages –, ce n’est pas le cas de la température des couleurs. Elles tendent vers le monochrome gris, bleu ou or, sont enneigées ou brûlantes des rayons du soleil. Leur association à l’obscurité ou à la clarté est amplifiée par les supports métalliques, mats ou brillants des tirages. Sans systématisme, de manière apparemment intuitive, Marine Lanier croise les rythmes ternaires pour faire circuler le regard entre des sensations, des sentiments, des états et des énergies contrastés – pour ne pas dire opposés.
On retrouve dans « Les Contrebandiers » bien des traits des travaux antérieurs de la photographe. Le premier est le goût des symboles. Substantifs précédés d’articles définis, les titres confèrent aux images une valeur générique emblématique : La Fatigue suivra L’Ascension mais Le Brouillard s’opposera à L’Éclaircie. Le second est, en effet, leur mise en tension. « Le Soleil des loups » (2015-18) confrontait déjà le jour et la nuit mais Marine Lanier semblait résoudre la contradiction en baignant dans une lumière d’éclipse la vie de deux enfants sur le relief inversé d‘un plateau volcanique. La série « Les Contrebandiers » exacerbe quant à elle les polarités. Les frontières administratives et légales, dont semblent se jouer les hommes et les femmes qu’elle a photographiés, s’effacent devant des frontières sensibles, voire existentielles, nées de la montagne et de ses contrastes.
C’est pourquoi il est finalement erroné de parler de paysage. Chez Marine Lanier, la nature ne se contemple pas mais s’éprouve tout en se fabulant. Elle est un environnement, un milieu, à la fois physique et fantasmé. D’où ces variations entre les images. D’où leur atmosphère voilée. D’où ces figures absorbées. D’où cette lumière qui, froide ou chaude, nous unit au monde. Chez Marine Lanier, il n’est pas question de point de vue, mais de point d’immersion.
Étienne Hatt
▬▬ MARINE LANIER
Née en 1981 à Valence, Marine Lanier vit et travaille entre Crest et Lyon. Après des études de géographie, lettres et cinéma, elle est diplômée de l‘École Nationale supérieure de la Photographie d’Arles en 2007. Aujourd‘hui, elle est représentée par la galerie Espace Jörg Brockmann (Suisse). Elle expose son travail en France et à l‘étranger (États-Unis, Chine, Canada, Australie, Belgique, Suisse, Angleterre, Allemagne, Luxembourg, Espagne, Portugal, Italie). En 2016, elle publie une monographie de son travail aux éditions Poursuite, Nos feux nous appartiennent, accompagnée par un texte de l‘écrivaine Emmanuelle Salasc-Pagano. En 2023, une nouvelle monographie sera publiée chez le même éditeur, Le Soleil des loups, accompagnée par un texte de l’écrivain américain Rick Bass.
Elle a été lauréate en 2018, d’une bourse du CNAP pour le projet Les Contrebandiers. Elle poursuit actuellement cette série dans les Pyrénées avec le soutien de la Résidence 1 + 2 Photographie et sciences Toulouse, du Centre Photographie de Lectoure, du Bus espace culturel mobile. Elle travaille parallèlement sur son projet Le Jardin d’Hannibal dans le cadre de la commande Radiososcopie de la France portée par la BNF.
Ses œuvres font également parties de nombreuses collections et institutions publiques et privées (CNAP, Musée d’art et d’archéologie d’Aurillac, BNF, Centre d’arts plastiques de Vénissieux, Artothèque de Grenoble, Fondation Louis Vuitton, Musée Nicéphore Niepce, L’Imagerie, Conservation du Patrimoine de la Drôme) et de collections privées (France, Belgique, Suisse, Pays-Bas, États-Unis, Canada, Chine, Albanie, Suède).
Parallèlement à sa pratique photographique elle déploie son travail à travers l’écriture et le cinéma. Sa pratique de l’écriture est hybride et revêt diverses formes, qui a pris place dans ses expositions et ses publications. En 2021-2023, elle travaille sur deux textes plus amples, Falco et Chien du soleil qui feront l‘objet d‘une publication, ainsi que sur deux projets de films Un Faucon au poing et Les Garçons de la forêt rouge. Ces derniers projets d‘écriture sont soutenus par le Conseil départemental de la Drôme, la Drac Auvergne-Rhône-Alpes, la Maison des écritures de Lombez, le LUX Scène Nationale-Valence, le Centre d‘art et de photographie de Lectoure, et la Région Occitanie.
Parallèlement à son activité artistique, elle enseigne le cinéma sous la forme de séminaires articulés autour de la question de notre besoin d’appartenance à l’école Bloo de Lyon.
Elle accompagne également des photographes dans un projet personnel sur le long cours par des suivis artistiques personnalisés et mène régulièrement des workshops de photographie autour de la question du récit (Ecole Bloo, L’Imagerie de Lannion, Musée Nicéphore Niepce de Chalon-sur-Saône).
Son travail est également visible sur Documents d’artiste Rhône-Alpes
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Un événement CCU en partenariat avec les Boutographies